By 25 mars 2020 0 Comments Read More →

Divico: la nouvelle étoile montante

Né en 2013, le Divico offre une résistance élevée aux principales maladies de la vigne et ne nécessite pas, ou très peu, de produits phytosanitaires. Considéré par certains comme le futur de la viticulture helvétique, ce cépage encore méconnu commence à faire sa place dans le vignoble genevois.

«La pression, des consommateurs comme des politiques, en direction d’une viticulture sans intrants a débouché sur un nouveau projet de sélection de cépages interspécifiques. Bien qu’ils soient communément appelés hybrides, ce terme se révèle quelque peu malheureux parce qu’il est connoté de manière très négative et parce qu’il ne correspond pas exactement à la définition des hybrides du monde animal. La première étape de ce nouveau programme à donné naissance au Divico et à l’IRAC 2060, un cépage blanc dont le nom sera dévoilé à la fin de l’année 2018, qui possèdent une excellente résistance aux maladies cryptogamiques comme le mildiou et l’oïdium», explique Jean-Laurent Spring, le chef du groupe viticulture d’Agroscope Changins-Wädenswil.

Dvico

Grappe de Divico
Crédit photo: Agroscope

Une création made in Switzerland
En 1996, cet agronome croise du Gamaret, qui avait fait son apparition depuis moins de dix ans, avec du Bronner, un blanc germanique né en 1970 à Freiburg-im-Breisgau du mariage de vignes sauvages asiatiques et américaines avec des variétés européennes. De ces aïeux Vitis rupestris, Vitis lincecumii et Vitis amurensis, l’IRAC 2091 comme il est alors appelé, a conservé des mécanismes de résistance contre l’oïdium, le mildiou et la pourriture grise. Ces trois maladies, provoquées par des champignons, sont responsables de la grande majorité des traitements que les vignerons appliquent sur leurs vignes. Et ceci, qu’ils pratiquent une agriculture conventionnelle ou biologique, car cette dernière, contrairement à certaines idées reçues, ne consiste pas à abandonner tout traitement, mais lutte contre les ravageurs au moyen de pesticides issus de sources naturelles. En 2013, après une longue série d’essais, de vérifications et de processus administratifs, l’IRAC 2091 est présenté au grand public sous le nom de Divico, l’ambassadeur des tribus helvètes qui affrontèrent Jules César à Bibracte en 58 avant Jésus-Christ.

Un départ en fanfare
Dans un contexte de défiance généralisée face aux traitements phytosanitaires, l’annonce de l’arrivée sur le marché d’un cépage – qui marie une résistance naturelle à presque tous les nuisibles à des qualités agronomiques et œnologiques certaines  – ne pouvait qu’intéresser de nombreux vignerons. A Genève, la région viticole la plus innovatrice de Suisse, près d’une dizaine d’encaveurs ont planté cette curiosité, qui va sans doute rapidement devenir une spécialité, voire un classique du vignoble helvétique. Le plus précoces de ces pionniers, qui commercialisent déjà des Divico en monocépage, nous expliquent les avantages et les particularités de ce cépage qui donnerait naissance – selon « Cépages Suisse Histoires et origines » le dernier ouvrage du Dr Vouillamoz – à « des vins très colorés avec des arômes d’épice, de poivre, de clou de girofle, de myrtille et de violette, riches en tanins de bonne qualité».

Ils ont planté du Divico

Dégustation de Divico

Pionniers du Divico
Crédit photo: Jean Révillard


Florian Ramu
Domaine des Alouettes à Bourdigny
«Nous avons choisi de planter du Divico dans une parcelle qui se trouve au milieu d’un village.  Avec les discussions autour de l’agriculture et des produits phytosanitaires, il n’est pas très bien vu de traiter au milieu des habitations, explique Florian Ramu. Dans ce contexte, un cépage résistant aux maladies offre un avantage certain. Nous en avons planté 8600 mètres carrés, ce qui en fait la plus grande parcelle du canton». Bien que planté en 2015, la parcelle a déjà produit une vendange de près de 300 grammes au mètre carré lors de la vendange 2017. «Normalement, il ne devrait pas avoir de fruit avant la troisième, mais là nous avons été surpris de pouvoir faire cette première récolte. Ce qui signifie que le cépage s’est tout de suite plus dans la parcelle où nous l’avons introduit. De plus, nous ne faisons que deux traitements par année, au moment de la fleur», précise le jeune vigneron qui commercialise un rosé et un rouge à base de Divico sous son nom propre et non sous l’étiquette du Domaine des Alouettes. «Nous avons récolté des raisins d’un belle maturité, qui affichaient un taux de sucre de 90 degrés Oechslés. Il faut savoir que le Divico donne des petites baies, ce qui fait qu’il y a beaucoup de pulpe et peau d’eau.» Pour l’heure, le rosé comme le rouge élevé en barrique sont produits en quantité encore confidentielles. « On parle de quelques centaines de bouteilles, sourit Florian Ramu, car il faudra voir le retour de la clientèle avant de passer à des quantités plus importantes, surtout si cette curiosité est positionnée comme une spécialité haut de gamme.»

Thierry Anet
Vignoble de l’Etat à Lully
«Le Divico, qui s’appelait encore IRAC 2091, a été planté pour la première fois en 2009. Une partie partait pour des essais de vinification à la station cantonale qui me laissait le solde, ce qui faisait exactement le contenu d’une barrique. C’est pourquoi, nous avons dès le début vinifié ce nouveau cépage sous bois», déclare Thierry Anet. A la vigne, aucun traitement phytosanitaire n’a été utilisé pendant les quatre premières années «qui étaient des années faciles, précise le professionnel. En 2013, il a été touché par la grêle. Depuis, nous nous limitons à une pulvérisation de cuivre et de soufre par saison. Ce qui se révèle encore mieux que ce que nous promettaient ses concepteurs qui parlent de un à trois traitements par cycle végétatif. Du point de vue agronomique, on peut dire qu’il tient toutes ses promesses. Il faudra voir si les résistances du Divico vont tenir sur la durée ou si les ravageurs parviendront à contourner les mécanismes de défense du cépage». Mais pour répondre à cette question, comme pour savoir si le Divico a hérité des problèmes de dépérissement qui affecte le Gamaret lorsque la vigne atteint une vingtaine d’années, il faudra attendre… Pour l’heure, les 3000 mètres de Divico du Domaine de la République et canton de Genève se portent à merveille, permettent d’économiser plus de 1000 francs à l’hectare grâce à l’abandon des traitements et plaisent à une clientèle intéressée par le développement durable.

Florian Barthassat
La Cave de Genève à Satigny
«La situation de la Cave de Genève est un peu particulière. En tant que coopérative, nous devons nous assurer que nos vignerons ne plantent pas par effet de mode un cépage qu’il ne sera pas possible de commercialiser», déclare l’œnologue de la locomotive du vignoble genevois qui encave près du tiers de la récolte cantonale. «Nous avons fait une première vinification test l’année passée. Il faut se souvenir que 2016 était une année très difficile sur le plan viticole et que les vignerons avaient fait entre douze et quinze traitements à cause des conditions météorologiques défavorables. En comparaison, la première livraison de Divico n’avait reçu que deux traitements. L’intérêt ne fait donc aucun doute. Le problème est le suivant: une fois que les vignerons de la Cave ont appris que les essais de vinification étaient concluants et qu’il fallait six fois moins de traitements phytosanitaires, tout le monde est intéressé à en planter. Et là, nous devons leur expliquer qu’il y a des limites aux volumes que nous pouvons valoriser.» De fait, la première plantation a été faite en 2014 et quatre ans plus tard, les vignerons de la Cave de Genève cultivent déjà près de quatre hectares de Divico. «Ce qui représente une croissance extrêmement rapide. Il existe un potentiel pour un vin en monocépage, qui va sans doute intégrer la gamme Trésor, et pour un assemblage, mais il faudra un peu de temps avant de pouvoir écouler des volumes importants même si la question des intrants dans la viticulture est une problématique aujourd’hui essentielle pour le praticien comme pour le consommateur.»

Cet article est paru dans le hors-série Genève de mai 2017 réalisé par VINUM pour le compte des vins de Genève et de Swiss Wine Promotion

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