By 15 avril 2020 0 Comments Read More →

Le vin, sacré trait d’union (épisode 2: l’époque romaine)

Au coeur de l’Europe, le Valais est depuis trois millénaires sur le chemin des grandes routes reliant le sud et le nord du continent. Marchands, soldats, religieux, artisans, intellectuels, voyageurs et exilés ont traversé cette région. Tous y ont séjourné, certains s’y sont installés apportant avec eux des idées, des coutumes, des plantes et des innovations qui ont façonné cette région. L’un des pôles d’attraction importants du Valais a toujours été l’Abbaye de Saint-Maurice, qui possède des vignes depuis sa création, il y a plus de 1500 ans.

La vision d’un Valais enfermé entre ses montages et peuplé de goîtreux vivant leur courte vie sans jamais sortir de leur village, ni croiser un seul étranger jusqu’à ce que les cantons voisins les délivrent de leur enfermement en construisant le chemin de fer est une image d’Epinal malheureusement courante. Elle s’entrecroise souvent avec celle du Moyen-Âge, que les esprits simples résument à une «période sombre» durant laquelle une population en semi-servitude multipliait les pratiques superstitieuses en vue de survivre à la faim, aux pestes et aux bûchers. Parfois, ces beaux esprits s’étonnent tout de même qu’entre deux autodafés, cette Europe médiévale ait eu le loisir d’inventer l’université (Bologne 1088, Oxford 1116, Paris 1120) et la littérature arthurienne ou d’émailler le continent de cathédrales. De même, le Valais, pays de cols traversé par les routes reliant l’Italie – qui était la porte d’entrée vers Byzance, la route de la Soie et celle des épices – et les puissants royaumes du nord (Saint-Empire Romain Germanique, France, Angleterre) a été énormément influencé par les voyageurs qui l’ont traversé, comme par les pérégrinations de ses autochtones. Et tout particulièrement au Moyen-Âge, une période complexe qui débute au 5e siècle, à la chute de l’Empire romain, et se termine mille ans plus tard, au 15e siècle. Les plus impressionnants témoignages de ces échanges qui ont métamorphosé le canton et ses habitants, mais aussi sur son vignoble, sont exposés dans le trésor de l’Abbaye de Saint-Maurice. Plus ancien monastère en activité d’Europe occidentale, ce couvent, fondé en 515, peut sans doute aussi revendiquer le titre de plus vieux propriétaire viticole du monde. Au travers de quelques pièces maîtresses forgées à Rome, à Paris ou en Inde, ce reportage entend rappeler le rôle de carrefour entre Orient et Occident, entre nord et sud des Alpes, entre latins et germains, qu’a joué depuis deux millénaires le Valais.
www.abbaye-stmaurice.ch

Coffret reliquaire de Teudéric
Ce petit sarcophage en or et en émail cloisonné a été fabriqué au milieu du 7e siècle, dans le sud de l’Allemagne où se répand alors le culte de Saint-Maurice. A l’arrière de ce reliquaire présenté comme un don d’Eugène 1er qui fut pape de 654 à 657 on peut lire un texte latin qui indique que «Le prêtre Teudéric le fit faire en l’honneur deSaint-Maurice. Nordoalaus et Rihlindis en ordonnèrent la fabrication qui fut l’oeuvre  des orfèvres Undiho et Ello». L’inscription, qui précise que cet objet précieux était dédié dès sa création au légat de la légion thébaine, confirme que l’influence de l’Abbaye s’étend bien au-delà des frontières régionales, et ce, peu de temps après sa fondation par le roi Sigisond. «Durant le haut Moyen-Âge, le monastère exerce une influence spirituelle et intellectuelle très importante, explique le chanoine Roduit, procureur de l’Abbaye de Saint-Maurice. Largement sous-estimée aujourd’hui, cette influence est d’autant plus difficile à mesurer que suite aux destructions causées par les Lombards et les Sarrasins, nos archives n’ontconservé quasiment aucun document du premier millénaire».

Coffret de Teudéric Photo: Abbaye de Saint-Maurice

Coffret de Teudéric
Photo: Abbaye de Saint-Maurice

Importations romaines et production indigène
L’étude des pollens montre une baisse significative de la présence de la vigne après la conquête romaine. Par contre, les premières amphores, originaires d’Italie, font leur apparition au milieu du 1er siècle avant Jésus-Christ. Quelques dizaines d’années plus tard, les provenances de ces contenants – fabriqués en quantités industrielles et destiné à un usage unique – se diversifient. Des récipients en terre cuite commencent à arriver de toutes régions de l’empire qui était déjà fortement globalisé et s’étendait de l’Espagne à l’Egypte et de la Grande-Bretagne au Maghreb. Si les récipients d’Italie et de Gaule dominent durant les premières décennies de l’occupation romaine, on voit apparaître au début de notre ère des récipients fabriqués en Espagne, en Crète et sur les îles de la mer Egée. A partir du 2e siècle, la baisse des importations d’amphores – dont certaines font alors le voyage depuis l’Afrique du nord, le sud de la Turquie ou Gaza, en Palestine – coïncide avec l’apparition des premières serpettes à vendanger, ce qui permet d’imaginer qu’un vignoble indigène commence à se structurer dans la haute vallée du Rhône et à prendre de l’importance.

Cet article fait partie d’un dossier sur l’histoire du vignoble valaisan vu au travers du trésor de l’Abbaye de Saint-Maurice, le plus ancien propriétaire de vignes au monde paru dans le hors-série Valais 2017.

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